La Monarchie Marocaine et la République Française : une analyse comparée (1/5)

Le fleuve envoûtant qui sépare les berges franco marocaines revêt prestement l’allure d’un océan tourbillonnant aussitôt que l’on s’attarde sur les principes constitutionnels qui régissent les deux nations souveraines. Le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple, qui, après une Révolution tumultueuse, hissant la démocratie au plus haut et au-dessus de lui-même, tourne son regard vers le Sud de son continent pour y apercevoir encore deux cents ans plus tard l’alliance indéfectible de l’une des plus anciennes monarchies régnantes et de son peuple, pleinement engagés dans le troisième millénaire. Ce qui déchaîne impétueusement cet océan dont le sel ne tarit pas réside dans une controverse sempiternelle : celle du fondement du pouvoir politique. D’un côté, la république laïque et démocratique repose sur l'idée que la source du pouvoir est exclusivement celle du peuple, la volonté du citoyen fait loi. De l'autre côté, la Monarchie marocaine se réfère à la religion islamique, où le souverain est perçu non seulement comme un chef d'État, mais aussi comme le Commandeur des Croyants, conformément à “ la tradition la plus lointaine et la plus ancrée dans les esprits et les mœurs” (1).

Les récents soubresauts politiques au sein de la République française illustrent parfois une fragilité institutionnelle lorsque confrontée aux défis contemporains. La stabilité et la continuité de la Monarchie constitutionnelle chérifienne apparaissent, au regard des incertitudes et des crises multiples qui se propagent à travers les nations, comme une perspective politique digne de considération.

Face à l’étiolement perceptible des modèles républicains, il convient de mesurer le dimensionnement de la Monarchie constitutionnelle pour relever les défis du XXIe siècle, parmi lesquels nous dénombrons la crise de confiance dans l'autorité, les instabilités économiques et géopolitiques, les brusques mutations sociétales et les menaces écologiques. Dans quelles mesures la France, avec une Ve République en quête perpétuelle de stabilité et de consensus, peut-elle encore être présentée comme un modèle de référence ?

Ce papier est décliné en deux temps. Nous examinerons d’abord les fondements du pouvoir établi au cœur des deux régimes politiques, à travers des réflexions autour des devises respectives ainsi que sur les notions d'identité et de cohésion nationales. Nous nous intéresserons ensuite à la réactivité et la continuité des réponses apportées par chaque système aux défis contemporains, en nous focalisant notamment sur les crises sociales et la transition énergétique.

(1) Tozy, M. (1999). Monarchie et Islam Politique au Maroc. Presses de Sciences Po.

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