CJUE et Sahara Marocain : l’écume d’un vieux colonialisme
POLITIQUE
10/15/20243 min read
Nous pouvons distinguer deux courants se concurrençant aujourd’hui sur la scène politique : ceux qui mettent l'idéologie au service de la nation et de ses intérêts, et ceux qui mettent la nation et ses intérêts au service de l’idéologie. Un certain nombre de théoriciens politiques jettent naturellement l’opprobre sur ce dernier courant, jugé inapte à concourir efficacement au bien-être des populations. Ainsi, que ce soient Carl Schmitt (1), Raymond Aron (2) ou Henry Kissinger (3), tous auraient méthodiquement condamné la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE), organe judiciaire indépendant de la commission, du parlement et des gouvernements européens, suite à l’invalidation de l’accord de pêche et d’agriculture conclu en 2019 entre la Commission Européenne et le Royaume Chérifien. (4)
Et pour cause, au mépris d’intérêts économiques substantiels et mutuels (5), la CJUE, en discordance stridente avec le concert des nations (6), a catapulté le Front Polisario, organisation surannée (7), fantoche (8) et terroriste (9), comme éminent porte-parole des Sahraouis, ceux-là même qu’ils tiennent en otage dans des conditions insoutenables, au milieu de l’enfer des camps de Tindouf, dans l’espoir d’une rançon politique (10). A quoi bon s’ériger organe de justice indépendant des institutions nationales et européennes si c’est pour souiller son impartialité avec une engeance que la décence politique et diplomatique réprouve sans ambigüité ?
Ainsi la CJUE s’est-elle compromise aux yeux de monde et du contribuable européen, suscitant la gêne manifeste de la commission et des gouvernements, qui tour à tour désavouent la façon dont elle intente aux intérêts politiques et économiques dont ils sont les garants (11) (12). A l’échelle du parlement européen, cette instrumentalisation de l’Etat de droit a été saluée par les députés de gauche tandis qu’elle fut l’objet de vives dénonciations de la part de députés sur la droite de l’échiquier politique (13) (14). Il convient pour l’esprit attentif de considérer ces réactions de part et d’autre comme inscrites dans une certaine continuité historique : celle d’une gauche européenne éminemment idéologique et, en conséquence, intrinsèquement colonialiste (15). Ses valeurs sont indépassables, universelles, et doivent être de fait naturellement imposées à une altérité sous-développée, à une civilisation arriérée. Il faut sauver l’Afrique malgré elle. Et pour ce faire, décréter avec fantaisie, depuis le Luxembourg, ce que doivent être la délimitation et l’intégrité territoriale des nations africaines, dans la continuité droite et précise des exactions colonialistes des siècles précédents. Elle est là, cette idéologie dont Schmitt, Aron et Kissinger nous mettent sagement en garde : celle de l’orgueil et du mépris. Et c’est en filigrane ce qu’il convient de lire à travers le cheval de bataille de la CJUE et de ses partisans du parlement européen.
Soyons sérieux avec ceux qui veulent être sérieux : l’Europe doit de toute urgence définitivement dépasser ces paradigmes éculés pour cultiver dans la meilleure des sérénités un partenariat qui répond à l’ensemble des grands défis de l’époque. Le Royaume du Maroc n’est ni un butin ni un simple voisin méditerranéen. Le Royaume du Maroc est un allié crucial et incontournable pour l’avenir, qu'il convient d'adresser comme tel.
(1) Schmitt, C. (1932). The Concept of the Political. University of Chicago Press.
(2) Aron, R. (1962). Paix et guerre entre les nations. Calmann-Lévy.
(3) Kissinger, H. (1994). Diplomacy. Simon & Schuster.
(6) https://lematin.ma/nation/sahara-comment-le-maroc-enchaine-les-succes-diplomatiques/239650
(15) Aron, R. (1955). L'opium des intellectuels. Calmann-Lévy.
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